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« Une preuve n'est pas le premier pas vers une vérité spirituelle » ou « la logique holistique est supérieure à la logique intellectuelle »

Le 08/04/2024

Nous connaissons tous la parabole de la grotte. Un groupe qui regarde dans la direction indiquée par un pseudo-guide qui prétend expliquer ce qu'est la lumière à partir de l'ombre projetée par une bougie, et empêche ainsi le groupe de sortir et de savoir que la lumière vient du Soleil, mais aussi les empêche d'être libres en dehors de la grotte.

Tout bon mensonge est basé sur une petite part de vérité, comme tout bon plan de bataille prévoit un chemin de repli.

Mais a-t-on un jour vraiment médité cette parabole ? Elle contient plus d'enseignements que celui de la spoliation d'un usurpateur …

...Si nous considérons cette histoire dans les détails, car n'est-il pas courant de dire, selon l'adage bien connu, que « le Diable se cache dans les détails », nous apprendrons d'autres choses qui se trouvent être des éléments essentiels qui dirigent chaque jour et constituent la trame de chaque organe, partie ou « Tout » de notre société.
Tels des humains primitifs ( je précise pour les réactifs : pas « premiers » ) nous passons notre temps à écouter des personnes dont l'autorité est définie et établie par des critères trop restrictifs et trop spécifiques pour être d'une portée et d'une valeur universelle et incontestable. Nous prenons en permanence des singes-savants pour des sages.

Mais revenons pour argumenter la pertinence de ceci à notre parabole.

Cette grotte, pour poser une considération matérielle concrète, est profonde. C'est-à-dire que, assis au fond, il ne suffit pas de se retourner en restant assis pour en apercevoir la sortie et la lumière extérieure, car dans ce cas l'histoire n'aurait aucune valeur.

Non. En fait, il y a de nombreux contours, des virages, des cavités par-ci par-là, de l'eau qui suinte sur les parois et fait entendre un goutte-à goutte,  une petite source peut-être même au fond d'une des cavités, puis, après un long parcours, on arrive au fond. C'est là qu'un groupe se tient, assis, à l'écoute de l'un des leurs qui se tient debout devant eux.

Dans ce groupe, assis à l'arrière, un individu qui, peut-être est-il distrait par le bruit de goutte-à-goutte diffus dû à une humidité proche, s'assoupit. Il est distrait aussi car, étant au fond, il n'entend pas très bien le guide. Il s’ennuie, au final. Tant et si bien qu'à un moment, il décide de se lever et d'aller se promener. Personne ne fait attention à lui et, de toute façon, il connaît par cœur l'histoire du guide pour l'avoir entendu maintes fois.
C'est une première étape. Nous verrons qu'il y en aura d'autres, et que certaines de ces étapes constitueront des prises de conscience décisives. Mais, déjà, nous pouvons ici méditer sur ce qu'il faut de détachement à cet individu pour ne pas être pris par l'admiration béate ou l'ambition de prendre la place convoitée de guide ! Et aussi sur le rôle de l'ennui dans la vie d'un être, l'ennui tant mis en avant par les psychothérapeutes pour l'équilibre de l'enfant … bref.

Pendant que j'évoque ces considérations, notre individu a atteint ce qu'il conçoit comme le fond de sa grotte, qui en est en réalité le devant et la sortie. Là ou se perçoit la lumière du monde extérieur. Une somme d'émotions passe en lui. L'étonnement, la méfiance, la peur, la fascination. Il est ébloui car ses yeux se sont formés à l'obscurité.
A cet instant, pourtant, il n'est pas encore détaché du groupe. Il n'est pas encore affranchi et libre. Son désir n'est pas de fuir, mais de retourner en arrière afin d'aller annoncer la bonne nouvelle, et leur dire qu'il faut venir absolument voir ça !

C'est la deuxième étape et la première prise de conscience. Il revient sur ses pas.

Il rejoint le groupe, toujours hypnotisé par le guide qui explique scientifiquement pourquoi la lumière crée l'ombre. Il s'assoit à la place qu'il a quitté discrètement pour ne pas perturber l'ordre, et ne pas s'attirer les foudres aveugles de l'autorité collective. Mais il ne résiste pas à communiquer ce qu'il a vu. Il exhorte ses voisins : « je vous assure qu'il y a là-bas une lumière étincelante, mille fois plus forte que la bougie ! »
« Tu délires ! » lui répondent ses camarades, « ce n'est pas possible. Écoutes notre guide, il le dit. Et il le sait, lui. La bougie est la seule lumière ici, c'est très scientifique. Tu ne peux pas le contester. Il le démontre par l'observation de l'ombre ! »

Notre individu insiste : « Mais moi aussi je peux prouver». « Alors nous t'écoutons, et nous te regardons... » lui répondent ses camarades .
Alors, lui de justifier : « Pour que je puisse vous démontrer, vous devez d'abord me faire confiance, vous lever et me suivre, car je ne peux pas apporter la preuve jusqu'à vous, mais elle existe bel et bien. »
Les gens du groupe se moquent de lui, car il n'a pas de preuves « tu es un charlatan, tes propos sont idéologiques et tu cherches à nous tromper, nous détourner du savant et renverser notre guide. Tu n'as aucune preuve. Tu mens. »

Notre individu a ici sa deuxième grande prise de conscience. C'est l'intuition, mais aussi la confiance en son intuition,  qui l'ont conduit, à travers les raisons et les conditions matérielles de sa fugue et de son errance, vers un chemin inconnu, qui jamais ne pourra être démontré. Les raisons qui amènent à se lever et quitter le fond de la grotte ne s'argumentent pas. Elles sont là ou elles ne sont pas là. Elles opèrent ou pas. Mais elles sont silencieuses et ne touchent que l'intuition.

Notre ami, maintenant qu'il a compris qu'il ne pourra jamais apporter la preuve que la sortie existe, que le Soleil existe, qu'autre chose existe, même s'il n'en connaît pas encore bien la teneur, et qu'il ne peut donc l'expliquer en détails, maintenant qu'il est nu face à la crédulité et l'immobilisme volontaire de ses camarades, est comme un fruit mûr. Tout ceci est vain. Le groupe est vain. Le guide est en fait un gourou matérialiste et ses démonstrations ne s'appuient que sur ce qui n'a, en réalité, déjà plus besoin d'être étudié, car ce n'est pas là un véritable objet de science. La science est l'aventure intérieure qui pousse à se lever et renverser la table de la conscience et rebattre les cartes des règles acceptées, qui pousse à redéfinir celui qui est légitime à être reconnu comme savant.

Alors notre ami franchi le seuil de sa grotte, et là il a la dernière prise de conscience de notre histoire, qui est la première d'une autre longue série. Celle qui l'amènera à découvrir le monde extérieur, à découvrir tout d'abord que contrairement à ce qu'il croyait, il n'a jamais été seul à quitter un groupe. D'autres gens ont quitté d'autres groupes dans d'autres grottes, mais ceci est déjà une autre histoire ...

En conclusion de ceci, une réalité scientifique est une démonstration partielle et locale, ainsi il n'est pas nécessaire de se lever et de marcher pour s'en convaincre. Mais une vérité spirituelle nécessite comme condition incontestable de commencer par se lever et marcher dans l'obscurité, sans voir et sans savoir ce que l'on va chercher. Ici c'est l'intuition, l'instinct, le fruit d'une simple errance peut-être même, mais encore et peut-être même surtout une certaine confiance en soi sans dogme qui guide vers une vérité. L'intuition comme guide, C'est la logique holistique. Qu'est ce que l'intuition ? « L'intuition est un instinct conscientisé » nous enseigne Rudhyar. Conscientisé.

Et une caractéristique de ce qui distingue une réalité d'une vérité, c'est l'évolution des réalités de ses conditions de vie intérieure et de ses perceptions sensorielles que permet et procure une vérité. Il y a là un rapport vertical entre la vérité et la réalité. Il y nos réalités qui nous permettent de définir ce qui est vrai, ce sont "les vérités", appelées telles par abus de langage. Et il y a la Vérité qui nous permet de percevoir ce qui est réel. (définir/ percevoir – intellect/intuition). Le mot "Vérité" exprimant un archétype, il ne peut connaitre de pluriel, au sens philosophique.